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Société

Polémique

Nitrate d'ammonium : le Port de Bayonne ne joue pas la transparence

Ramuntxo Garbisu

eitb.com

Un dossier dissimulé à la vigilance des élus ; des risques d'accident particulièrement minimisés : le projet de transit via le Port de Bayonne de nitrate d'ammonium est effectivement explosif.

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La présence probable d''une centaine de kilos de nitrate d''ammonium dans une cache de l''ETA hier en Dordogne, à même de constituer un redoutable explosif, vient percuter l''actualité du Port de Bayonne, où est actuellement étudié le projet du groupe chimique norvégien Yara de Pardies (bassin de Lacq) d''en transférer 20.000 tonnes (soit 5 à 12 navires par an) de cet engrais azoté, impliqué dans la tragédie d''AZF en septembre 2001.

Pour l''industriel, "substituer l''usage du Port de Bayonne à celui de Port la Nouvelle (Sud-Est) permet d''économiser 350 km de traction ferroviaire et ramène le site de Pardies dans les coûts logistiques des sites producteurs européens concurrents tout en l''inscrivant au sein du territoire Béarn-Pays Basque", écrit-il dans sa note d''intention.

Et le directeur du site Yara l''annonce sans ambages : après avoir étudié la possibilité de se rapprocher du port de Bordeaux, le dossier serait validé dans le Port de Bayonne après expertise de la Dreal (Direction régionale de l''Environnement de l''Aménagement et du Logement).

"Notre dossier est bouclé techniquement. J''espère que les intérêts électoralistes ne viendront pas le faire capoter", confie Philippe Michiels dans les colonnes de l''Usine Nouvelle.

Un discours économique qui a forcément séduit le gestionnaire du Port, la Chambre de Commerce et d''Industrie de Bayonne, mais qui a fait hérisser les poils de certains élus du Conseil Portuaire le 25 novembre dernier.

Le lieu de transbordement envisagé n''a rien de neutre, puisqu''il se situerait à hauteur du quai de l''Aciérie de l''Atlantique (et de ses canalisations d''oxygène liquide) et de la société LBC Sotrasol (dépôt chimique et pétrolier classé Seveso).

Au moment de donner leur avis sur cette question au sein de l''instance portuaire, les communes de Boucau et de Tarnos ont immédiatement manifesté leur opposition et leurs délégués ont voté contre.

La Ville d''Anglet, concernée par son vis à vis du Port sur l''autre rive de l''Adour, a pour sa part "réservé" son vote, imitée en cela par la représentante du Conseil Général des Pyrénées Atlantiques, Monique Larran-Lange.

Le nouveau Préfet devrait personnellement intervenir désormais le 11 janvier prochain pour recevoir les élus et les responsables du projet, afin de trouver un consensus sur la question, espère-t-il.

Il reste pourtant que, une fois encore dans cette zone portuaire, la transparence n''a pas été la priorité de ce dossier, au sein d''une vaste zone industrialo-urbaine où la question du plan de prévention des risques technologiques (PPRT) ne rassure guère.


Un projet gardé hors de la vigilance des élus

Ce projet n''est pas nouveau, puisqu''il figure depuis 2008 dans les dossiers de la DREAL (ex-DRIRE), quand sa présentation au Conseil Portuaire du 25 novembre 2010 n''était même pas inscrite à l''ordre du jour de la convocation.

Sur le dossier que les élus du Conseil Portuaire ont alors découvert, figure la notification d''un arrêté préfectoral pris le 26 octobre 2010, soit un mois auparavant par l''ancien Préfet Philippe Rey, faisant état de deux réunions préparatoires les 29 septembre 2009 et 5 octobre 2010 en sous-Préfecture de Bayonne "relatives aux conditions d''acceptabilité du nitrate d''ammonium technique sur le Port de Bayonne".

Le secrétaire général de la Préfecture des Pyrénées Atlantiques et celui des Landes, le sous-Préfet de Bayonne et le Directeur départemental des territoires et de la mer des Pyrénées Atlantiques, "représentants l''autorité investie du pouvoir de police portuaire du Port de Bayonne", ont donc déjà pris l''initiative de modifier et remplacer l''annexe III du règlement pour le transport et la manutention des marchandises dangereuses dans le Port de Bayonne.

Par leurs oppositions, les élus tarnosiens et boucalais (rejoints par l''opposition municipale d''Anglet) ont à l''évidence manifesté leurs exigences d''un débat bien plus en amont pour le transit d''une quantité de nitrate d''ammonium qui représente au minimum dix fois AZF à chaque bateau (et ce, pour 5 à 12 bâteaux par an)


La note d''accidentologie ne retient pas les leçons d''AZF

Qu''il soit conditionné en sac de 25 kgs ou en big bag d''une tonne, ces 20.000 tonnes de nitrate d''ammonium (NAT) sont loin de constituer un chargement neutre, précise la note de Yara, qui rappelle que son exposition externe et continue à une source de chaleur de 170°C provoque la fusion de l''engrais azoté et un dégagement de gaz toxiques.

Le produit devient explosif, quand il est en contact avec des matières combustibles ou des hydrocarbures, ou qu''il est percuté par un projectile "doté d''une vitesse de l''ordre de 800 m/s".

Dans une zone actuellement jonchée de bois entassé à cet endroit-là depuis la tempête Klaus, la proximité entre l''explosif et du combustible nécessite donc la recherche de "mesures de sécurité complémentaires", reconnait Yara.

Dans les propositions de l''industriel, il s''agirait donc d''assurer une méthodologie spécifique de transbordement des trains vers les bateaux sans passage au sol, d''une visualisation continue par vidéo-surveillance, d''une formation particulière des manutentionnaires, et de la présence de deux gardiens de surveillance des zones de travail.

Par ailleurs, une "zone de sécurité de 25 mètres" serait à respecter "pour éviter tout effet domino lié à un incendie externe lié au stockage de bois", ainsi qu''une "zone libre de 8 mètres" autour des wagons de NAT.

Cette zone de "25 m contre l''effet domino" pour des volumes de 1.500 à 3.000 tonnes à chaque chargement semble bien faible par rapport à cet autre effet domino constaté lors de l''explosion d''AZF, avec seulement 400 tonnes de ce nitrate d''ammonium.

Le 21 septembre 2001, à 10h18, cette quantité avait explosé, creusant un cratère de 70 mètres de long et 40 mètres de largeur, et de 5 à 6 mètres de profondeur. La détonation fut entendue à plus de 80 km de Toulouse, qui provoqua la mort de 30 personnes, faisant 2.500 blessés et de lourds dégâts matériels.

Dans la synthèse de l''accidentologie liée au NAT et destinée de l''autorité de police portuaire de Bayonne, aucune allusion à AZF&' || 'nbsp;n''est portée.

On n''y explique n''avoir jamais observé de "cas d''explosion spontanée" du NAT ; "les accidents de transport restent rares", estimés à 8 cas depuis 1900 ; et deux accidents dans des navires, "tous deux en 1947".

Et conclut : "La prévention des déversement du NAT, leur maitrise pour éviter que celui-ci ne se pollue, et la maitrise des risques d''incendie, en sont donc indissociables".

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