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Économie

Expérience coopérative

Quand le chemin de la sortie de crise passe par le Pays Basque

Frederik Verbeke

La Coopérative de Mondragon est "une alternative extrêmement réussie au mode d'organisation capitaliste de la production", voire même "une oasis dans le désert capitaliste", selon Richard Wolff.

  • La Corporation Mondragon, située au Pays Basque sud

    La Corporation Mondragon, située au Pays Basque sud

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En quête de solutions pour sortir de la crise, de nombreux médias anglophones se sont penchés cette semaine sur le Pays Basque et la réussite du système coopératif de Mondragon.

L'économiste américain Richard D. Wolff, professeur émérite à l'Université de Massachusetts, a publié ce dimanche dernier dans le quotidien anglais The Guardian un article intitulé "Oui, il existe une alternative au capitalisme: Mondragon montre le chemin". Quelques jours plus tard, l'agence Reuters diffuse une analyse détaillée d'Amanda Cooper sur l'économie basque, relayée ensuite par de nombreux médias, sous le titre "L'Espagne devrait tirer des leçons du Pays Basque".


Une alternative au capitalisme

Selon Richard Wolff, la Coopérative de Mondragon est "une alternative extrêmement réussie au mode d'organisation capitaliste de la production", voire même "une oasis dans le désert capitaliste".

Dans le capitalisme, les entreprises sont organisées d'une façon fortement non-démocratique: "une petite poignée de gens" (directeurs, actionnaires importants, conseils d'administration) "prennent toutes les décisions économiques pour la majorité des gens, qui réalisent pourtant la plupart du vrai travail productif". La Corporation Mondragon, par contre, montre de manière convaincante qu'il existe des alternatives.

Regroupant plus de 250 entreprises et entités (dont la moitié sont elles aussi des coopératives) dans plus de 20 pays, la Corporation Mondragon emploie près de 100.000 salariés et opère dans 4 domaines: finances, industrie, commerce et éducation. L'éventail va des banques et des fonds sociaux indépendants aux universités en passant par les appareils ménagers, les composants pour l'industrie automobile, les robots et d'autres produits de haute technologie.

Contrairement aux entreprises qui dominent le système capitaliste, la coopérative est fondée sur l'égalité de ses membres et la personne prime sur le capital. Les membres de la coopérative, la majorité des salariés, font preuve d'une grande implication : ils sont propriétaires de la coopérative, contrôlent sa gestion, se prononcent sur les grandes lignes stratégiques, participent aux bénéfices, etc.

La participation aux bénéfices obéit aux principes de solidarité et de modération car le premier objectif est le maintien et la création d'emplois. Ainsi, chaque coopérative met en commun 2% de son chiffre à un fonds de solidarité, chaque coopérative constitue un fonds de réserve alimenté par 45% des bénéfices quand il y en a, et les coopératives les mieux portantes accueillent les travailleurs dont l'emploi a été remis en cause à cause de la crise.

Mais l'esprit de solidarité va encore plus loin. En sus de 2% du CA consacré à l'enseignement supérieur (Université de Mondragon), 10% est mis à disposition d'un Fonds commun d'intervention qui favorise la création de nouvelles coopératives ou leur développement.


L'Espagne devrait tirer des leçons du Pays Basque

La réussite commerciale de la Corporation Mondragon "illustre la capacité du Pays basque à faire face à une crise de la dette de la zone euro qui a contraint Madrid à solliciter une aide européenne pour ses banques pouvant aller jusqu'à 100 milliards d'euros," observe Amanda Cooper dans son analyse publiée par Reuters. Selon elle, "l'Espagne devrait tirer des leçons du Pays Basque".

En misant sur le développement de son tissu industriel, sur les secteurs traditionnels, comme le fer, l'acier et des petites et moyennes entreprises qui font des composants pour les secteurs énergétique et automobile, le Pays Basque "se porte nettement mieux que le reste" de l'Espagne, victime du boom du tourisme qui a caractérisé les années 1970 et de l'explosion du marché immobilier qui s'en est suivi, estime Amanda Cooper.

La note de crédit de la Communauté autonome basque est supérieure à celle du gouvernement central, ses coûts de financement inférieurs de moitié à ceux d'autres régions et sontaux de chômage (13,55%) bien en-deçà de la moyenne nationale (24,4%).

Le Pays Basque est la cinquième puissance économique régionale en Espagne, avec un produit intérieur brut (PIB) de 66,1 milliards d'euros, soit 7% du PIB espagnol. La région peut souscrire des prêts à deux ans à un taux d'intérêt de 8,5% contre par exemple 18% pour la région de Valence et près de 14% pour la Catalogne.

Cette réussite est aussi liée aux exportations. "Si nous n'avions pas les exportations, nous vivrions des temps difficiles. C'est grâce aux exportations que nous survivons. Et la survie ne dépend pas seulement d'un marché, mais d'une multitude de marchés", a déclaré Mikel Lezamiz, directeur chez Mondragon.

"L'effondrement du marché domestique n'a pas tellement affecté les entreprises basques. Bon nombre d'entre elles vendent à travers le monde et peuvent mieux résister à la crise", estime de son côté Jose Luis Curbelo, directeur général de l'institut basque pour la compétitivité.


À lire aussi: "Mondragón Corporación Cooperativa - Un modèle coopératif d'économie efficace et socialement supportable au Pays basque espagnol" (Erika Vögeli) ; "Coopérative de Mondragon : l'exceptionnel modèle économique basque" (François Alfonsi).

En mars, la chaîne de télévision néerlandaise VPRO et la télévision flamande ont également diffusé un reportage sur Mondragon, "la merveille du Pays Basque". Et début janvier, la radio britannique BBC.

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