Le projet de Yara sur Bayonne est dans le flou, mais pas ses comptes

Alors que le 28 avril dernier, les socialistes s''écharpaient avec application au Conseil Général des Pyrénées Atlantiques sur la possibilité de transit de son nitrate d''ammonium vers le Port de Bayonne, le groupe norvégien Yara, basé sur le secteur industriel de Lacq et un des leaders mondiaux de productions d''engrais, communiquait ce jour-là sur sa satisfaction de voir ses résultats s''envoler au-delà de toutes ses espérances.

La flambée du prix de l''énergie n''a pas stoppé l''envolée des produits agricoles, qui dopent les ventes et les marges de l''utilisation d''engrais agricoles, ce qui a eu pour résultat immédiat de voir les livraisons du groupe augmenter de 7% sur un an,.

Par rebond, son chiffre d''affaires 2010 bondit de 34,7%, à 19,8 milliards de couronnes (2,5 milliards d''euros), quand l''objectif désormais affiché est d''atteindre un bénéfice annuel net de 2,50 milliards de couronnes (330 millions d''euros) pour 2011.

Dans le contexte, l''insistance du groupe Yara de réduire ses frais de 300.000 euros par an en déviant vers Bayonne (et non plus vers la Méditerranée) l''expédition de son "sulfureux" nitrate d''ammonium peut paraitre un objectif financier largement discutable, quand cette activité ne rapportera par ailleurs aucun gain économique à la zone portuaire de Bayonne (le chargement ne ferait que le traverser, sans stockage ni manutention sur place).

En fin d''année dernière, la nature "sulfureuse" du produit transporté (engrais agricole, mais également matière fortement explosive, mise en cause dans la catastrophe d''AZF à Toulouse) avait autant interpellé les élus locaux que les conditions très opaques dans lesquelles s''était présenté le projet, nourrissant une levée de boucliers au Pays Basque nord, et une contre-offensive pas forcément très élégante coté béarnais, ironisant sur le "port de plaisance de Bayonne".

Du côté des services préfectoraux de l''Etat et de la CCI, gestionnaire du Port, on ne cache pas son souhait de voir le Port prouver sa capacité à "gérer" un transit dangereux imposant une modification du mode de transport de matières dangereuses.

Un pari qu''aucun élu n''a accompagné, et qui appartiendra en fin de compte au propriétaire du domaine industrialo-portuaire, la Région Aquitaine, qui ne sait sans doute pas bien quoi faire de cette "patate chaude".

Dans l''attente de cette décision, qui devait être officiellement rendue fin avril, d''Anglet au Boucau, tous les regards continuent de se tourner avec une certaine inquiétude vers les zones de chargement des bateaux à l''embouchure de l''Adour.